• LE MONDE | 29.01.2014 à 11h38 • Mis à jour le 29.01.2014 à 11h45 | Par Mattea Battaglia et Stéphanie Le Bars

     

    Dessin d'Aurel sur le boycott des écoles par des parents d'élèves.

    Une centaine d'écoles perturbées par un absentéisme inhabituel des élèves, des syndicats d'enseignants alarmés, un ministre de l'éducation contraint de prendre la parole pour rassurer les parents : bien que limité, l'impact de la « journée de retrait de l'école », organisée vendredi 24 et lundi 27 janvier pour protester contre l'enseignement supposé de la « théorie du genre » dans les classes, a surpris tout le monde.

    Pour cette directrice d'école primaire située à Evreux, en pleine zone d'éducation prioritaire, l'inquiétude des familles a commencé à poindre jeudi 23 janvier. « Les parents avaient reçu le même texto, parfois plusieurs fois de suite, sans qu'ils sachent précisément d'où il venait, même s'il avait l'air de cibler la communauté musulmane », raconte-t-elle.

    Le message reçu pourrait prêter à sourire s'il n'avait été pris au sérieux par quelques parents : « Le choix est simple, soit on accepte la « théorie du genre » (ils vont enseigner à nos enfants qu'ils ne naissent pas fille ou garçon mais qu'ils choisissent de le devenir !!! Sans parler de l'éducation sexuelle prévue en maternelle à la rentrée 2014 avec démonstration et apprentissage de la masturbation dès la crèche ou la halte-garderie…), soit on défend l'avenir de nos enfants. »

    « DÉSAMORCER LA POLÉMIQUE »

    Dans cette école d'Evreux très attachée au dialogue avec les familles, où l'équipe s'est portée volontaire pour expérimenter les « ABCD de l'égalité », il n'a pas fallu grand-chose pour « désamorcer la polémique », note la directrice. « Les parents inquiets sont venus me questionner. Je leur ai expliqué que le nouveau dispositif n'avait rien à voir avec la prétendue théorie du genre, qu'on travaillait sur l'égalité entre les sexes pour lutter contre les stéréotypes, contre une orientation scolaire et professionnelle depuis trop longtemps défavorable aux filles… Et ils sont repartis en disant qu'ils nous soutenaient ! » Le lendemain, 4 enfants – sur 185 – manquaient à l'appel.

    Sur l'ensemble du territoire, l'appel au boycott lancé par Farida Belghoul, figure de la seconde « marche des beurs » (1984) aujourd'hui proche de la formation d'extrême droite Egalité et réconciliation d'Alain Soral (lui-même lié à Dieudonné), a eu un « impact localisé », martèle-t-on au ministère de l'éducation.

    Une centaine d'écoles, sur 48 000, ont été perturbées. Mais près de la moitié des académies ont été concernées, avec parfois une seule école touchée, parfois une vingtaine. Dans deux écoles de Strasbourg, près d'un tiers des élèves manquaient à l'appel. D'autres se sont fait porter pâle dans des écoles du Rhône, de l'Isère, des Pyrénées-Atlantiques, de la Seine-Saint-Denis, de la Seine-et-Marne, du Val d'Oise, du Loiret…

    « CLIMAT NAUSÉABOND »

    Alors que de nouvelles « journées de retrait » sont programmées chaque mois, le ministre de l'éducation nationale, Vincent Peillon, a voulu « rassurer tous les parents » : « Ce que nous faisons, ce n'est pas la théorie du genre – je la refuse », a-t-il assuré à l'Assemblée.

    Les syndicats ont tous – ou presque – manifesté leur indignation face à l'écho de cette « opération » relayée sur les réseaux sociaux. « A chaque fois, c'est le même type d'écoles, le même profil de familles qui sont visées : celles des zones sensibles, s'indigne Christian Chevalier, du SE-UNSA. Des familles déjà en difficulté, dont les enfants ont le plus à pâtir d'absences », ajoute-t-il, dénonçant « des actions de guérilla contre l'école de la République réunissant l'extrême droite, les intégristes religieux, les nationalistes et les anti-républicains ».

    Analyse peu différente au SNUipp-FSU. « On assiste à une instrumentalisation des élèves sur des territoires ciblés, une campagne de calomnie à fort retentissement sur Internet qui salit l'institution et les enseignants », déplore Sébastien Sihr, qui se dit choqué par ce « climat nauséabond ». Car au-delà de la dénonciation d'une supposée « théorie du genre », c'est une défiance à l'égard de l'école qui s'exprime ici sur un mode très virulent.

    DES CRAINTES RÉELLES

    « Le ministre doit expliquer de vive voix ce qu'est son projet, qu'on ne soit plus tributaire de ce qui tourne sur Internet », estime Ahmet Ogras, président du Comité de coordination des musulmans turcs de France et vice-président du Conseil français du culte musulman, « harcelé » par des parents inquiets. De son côté, le responsable du Rassemblement des musulmans de France, Anouar Kbibech, évoque une « inquiétude mais pas d'affolement ».

    Sur les réseaux communautaires, le sujet fait débat. Mais sur le fond, les craintes sont réelles. « Sous couvert de lutter contre l'homophobie et pour l'égalité des sexes, se diffuse une propagande pour l'idéologie du genre et pour l'homosexualité », assure Abdallah Dliouah, imam dans le sud de la France, interpellé sur le sujet par des fidèles. « Ce sujet suscite une énorme émotion, car il touche à la question cruciale de la transmission des valeurs », confirme Nabil Ennasri, du Collectif des musulmans de France, qui dénonce toutefois une tentative d'entrisme de l'extrême droite dans les milieux musulmans.

    Côté enseignants, les rumeurs propagées ces derniers jours en auront sans doute déstabilisé quelques-uns. Mais pour beaucoup d'entre eux, il y a urgence à rappeler le rôle de l'école dans la lutte contre les inégalités et les discriminations liées… au genre.


  • Le ministre de l'éducation nationale, Vincent Peillon vient de signer une lettre adressée ce soir aux 53 000 directeurs d'écoles, aux 7000 principaux de collèges et aux 4200 proviseurs de lycées.

    Le texte de deux pages a trois objectifs: demander à ces responsables de terrain d'informer les parents sur le contenu des enseignements, afin de casser la rumeur qui veut qu'il y ait dans les écoles "introduction d'une prétendue théorie du genre"; rappeler l'obligation scolaire qui a été mise à mal par la "journée de retrait de l'école", lundi 27 janvier et soutenir les enseignants "qui peuvent être victimes de menaces et de violences" dans l'exercice de leurs fonctions.

    Le ton de la lettre est grave et le ministre conclut que "quand l'école est attaquée dans ses fondements, il importe de se rassembler autour des valeurs républicaines et de les rappeler avec fermeté et pédagogie". Formule rarement choisie, il y a glissé un "bien cordialement à vous" écrit manuellement!

    Maryline Baumard


  • LE MONDE | 30.01.2014 à 11h11 • Mis à jour le 30.01.2014 à 13h09

     

    L'amendement se résume à une phrase: "L'école primaire assure les conditions d'une éducation à l'égalité des genres."

    C'est bien connu, avec les mensonges : plus c'est gros, plus ça a des chances de marcher. On est en train de le vérifier avec cet ahurissant appel au boycottage des écoles, un jour par mois, qui a déjà provoqué un absentéisme non négligeable dans une centaine d'établissements.

    Coordonné par un site Internet, ce mouvement des « journées de retrait des enfants des écoles » (JRE) entend dénoncer ce qu'il assure être « l'enseignement de la théorie du genre » à l'école, destiné à nier les différences entre filles et garçons et de nature à porter atteinte « à l'intégrité et à la pudeur » des enfants. Histoire d'affoler un peu plus les parents, ses initiateurs évoquent cours d'éducation sexuelle dès la maternelle, incitation à la masturbation et apologie de l'homosexualité…

     

    On croit rêver. Mais la rumeur a pris, et les fantasmes vont bon train. Les « ABCD de l'égalité » ont servi de prétexte à ce grand délire. Lancés conjointement par le ministère de l'éducation nationale et celui des droits des femmes et expérimentés dans dix académies depuis la rentrée 2013, ils consistent à organiser des ateliers pour lutter contre les préjugés et stéréotypes filles-garçons à l'école, afin de corriger les inégalités entre les sexes dès le plus jeune âge.

    BOBARD OU AMALGAME

    Cette fronde serait seulement ridicule si elle n'était révélatrice de deux réalités inquiétantes. La première est politique. Ce mouvement a été lancé par Farida Belghoul, ex-figure de la Marche des beurs dans les années 1980 et qui a, depuis, rejoint la mouvance d'extrême droite « Egalité et réconciliation », animée par Alain Soral, antisémite affiché, fidèle soutien de Dieudonné et qui se réclame désormais du national-socialisme.

     

    Mme Belghoul a reçu le soutien de tout ce que la droite compte de plus réactionnaire (les catholiques intégristes de Civitas, Béatrice Bourges, présidente du Printemps français, Christine Boutin…), bien décidée à mener l'offensive contre tout ce qu'elle estime être une menace contre l'« identité de la personne » : mariage pour tous, droit à l'avortement, égalité homme-femme, débat sur la fin de vie. En outre, cette mobilisation rejoint l'inquiétude exprimée, sur ces sujets, par le Conseil français du culte musulman, qui vient de demander des explications au ministre de l'éducation nationale. Cette sainte alliance, activée par l'extrême droite la plus radicale, ne recule, on le voit, devant aucun bobard ou amalgame.

    Or elle bénéficie, c'est le second constat, de l'extraordinaire efficacité des réseaux sociaux et d'Internet. Ceux-ci sont à l'évidence de fantastiques moyens d'accès au savoir et de formidables outils de débat démocratique. Ils peuvent aussi être de redoutables relais pour accréditer les fables les plus rocambolesques et les théories complotistes les plus échevelées. Surtout quand des agitateurs sans scrupule décident de surfer sur le climat délétère qui taraude la société française.


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    Vincent Peillon a présenté en conseil des ministres, mercredi 15 janvier, les grandes lignes de sa réforme des zones d’éducation prioritaires (ZEP).

    Un doublement de l’indemnité pour travailler en zone d’éducation prioritaire, du temps pour se former et pour travailler en équipe… Vincent Peillon a présenté en conseil des ministres, mercredi 15 janvier, les grandes lignes de sa réforme des zones d’éducation prioritaires (ZEP). Une refondation qui devenait urgente tant les établissements classés en ZEP décrochent du système général, entraînant avec eux les 20 % d’élèves qu’ils scolarisent. L’intégralité du nouveau dispositif sera rendu public jeudi mais on sait déjà que les nouveautés se déclinent sous trois angles : aider les enseignants, aider les élèves, améliorer l’environnement éducatif.

    Des professeurs valorisés. En ouvrant ses discussions sur le métier d’enseignant, en novembre 2013, Vincent Peillon avait posé une question cruciale : « Où est la difficulté à enseigner aujourd’hui ? » Pour lui, il allait de soi qu’il fallait reconnaître que les enseignants exerçant dans les zones les plus difficiles avaient des besoins particuliers. M. Peillon leur propose du temps et de l’argent.

    Il a en effet précisé en conseil des ministres que « dans l’ensemble de l’éducation prioritaire, les indemnités d’exercice spécifiques seront substantiellement revalorisées jusqu’à être doublées dans les situations les plus difficiles ».  Aujourd’hui, la prime ZEP est d’environ 100 euros par mois.

    Il a par ailleurs ajouté que « les enseignants des 350 réseaux les plus difficiles bénéficieront d’un temps pour se former, travailler en équipe et développer les relations avec l’élève et sa famille. Associé à un renforcement de l’accompagnement des nouveaux personnels et des équipes, un grand plan de formation continue contribuera enfin à enraciner une véritable culture du collectif. Enfin, quant au déroulement de carrière, le fait d’avoir exercé en éducation prioritaire constituera un critère d’éligibilité au grade à accès fonctionnel en cours de définition. »

    Les enseignants devraient donc bénéficier d'une décharge d'une heure trente dans leur service hebdomadaire d'enseignement afin de travailler en équipe. Aujourd'hui, le métier de professeur du secondaire est défini par l'obligation de dispenser 18 heures de cours par semaine. Ce service va être être réduit à 16heure 30 pour les enseignants de ZEP et les enseignants du premier degré vont bénéficier de 9 jours sans classe. La question qui reste en suspens est celle du calendrier. Une centaine d'établissements seront concernés à la rentrée à titre expérimental, mais on ignore encore comment se fera la montée en puissance au sein des 350 établissements Eclair (c'est-à-dire le label qui recoupe les établissements ZEP les plus en difficulté). La réponse n'est pas apportée par le communiqué du Conseil des ministres.

    Ces mesures visent à stabiliser les équipes alors que les établissements sont des plaques tournantes où sont nommés des jeunes enseignants. La progression des carrières se faisant de la banlieue vers le centre-ville, du nord du pays vers le sud, au fur et à mesure de l’accumulation de points. Il s’agit d’une reconnaissance que le métier d’enseignant est devenu pluriel et que les collèges de ZEP qui fonctionnent bien sont ceux dans lesquels l’équipe enseignante est stable. Mais pour que cela marche, il faudra que l’avancement permis pour enseigner en ZEP soit conséquent.

    Des élèves mieux aidés. L’éducation prioritaire doit devenir « le lieu privilégié de l’innovation pédagogique », a précisé le ministre devant ses pairs lors du conseil des ministres. Le terrain avait devancé cette belle intention politique : face à la difficulté à enseigner les fondamentaux à des enfants dont les familles sont éloignées de l’école, les enseignants n’ont pas attendu la déclaration de cette volonté ministérielle pour enseigner autrement. L’intérêt de l’annonce, c’est qu’alors que les inspecteurs bloquent parfois les initiatives de terrains, l’enseignant innovant de ZEP pourra désormais se sentir « couvert » par son ministre.

    Reste que le nœud du problème est plus globalement de faire entrer dans la culture scolaire le plus précocement des enfants qui ne bénéficient pas à la maison de la même chance que les fils de cadres supérieurs bercés aux jeux éducatifs et aux lectures d’albums. Il a ainsi été décidé que « la scolarisation des enfants de moins de trois ans sera assurée dans chaque réseau d’éducation prioritaire avec pour objectif un taux de scolarisation de 30% d’ici la fin du quinquennat ». Déjà maintes fois annoncée et répétée, cette mesure progresse très doucement sur le territoire puisque les premiers des 60 000 postes sont venus « réparer » les coupes de la mandature précédente avant de pouvoir apporter un « vrai plus » dans les écoles.

    Un cadre plus scolaire. Par ailleurs, et c’est là encore un rappel plus qu’une nouveauté, « à l’école élémentaire, le dispositif « plus de maîtres que de classes » sera étendu progressivement au cours du quinquennat dans chacune des 7000 écoles de l’éducation prioritaire ». Il s’agit de permettre de prendre en charge la difficulté en lecture ou en calcul dès qu’elle apparaît, soit en CP ou en CE1.

    En plus, et comme l’éducation prioritaire s’organise plutôt autour des collèges que des écoles, « dans tous les collèges de l’éducation prioritaire, les élèves de 6e seront pris en charge de façon continue jusqu’à 16 h 30 grâce à des recrutements d’assistants d’éducation permettant de leur proposer des activités pédagogiques et éducatives en petits groupes lorsqu’ils n’ont pas cours ».

    L’idée, elle aussi maintes fois répétée, que le cadre scolaire est plus propice au travail que la cage d’escalier préside à cette mesure que vient compléter un dispositif lui aussi déjà connu – mais ciblé cette fois sur les 20% d’enfants des établissements ZEP – de développer « dans le cadre du programme des investissements d’avenir et en collaboration avec les collectivités locales, des internats de la réussite ». Une version élargie des internats d’excellence qui, eux, ne misaient que sur quelques jeunes méritants. Il ne reste qu’à les construire.

    Le président de la République avait annoncé lors de sa conférence de presse de mercredi que « les mesures seraient d’une ampleur inédite ». le sont-elles vraiment ? A partir du moment où la carte des ZEP ne change pas, où il n’est pas possible d’entrer et de sortir du dispositif avec souplesse, peut-on, vraiment parler de « refondation » ? La réponse n’est pas évidente. On vit en effet sur un empilement de dispositifs dont il est très difficile de sortir. Sont classés ZEP des établissements qui ne le méritent plus, devraient entrer dans la classification d’autres collèges qui ne bénéficient pas de l’appellation et des moyens faut d’avoir fait un lobbying suffisant…

     

    • Maryline Baumard
      Journaliste au Monde

  • Vingt élèves de la classe de CM2 de l'école de la Tilleulière sont partis lundi matin en classe de neige. Le car a pris la direction de Super-Besse, dans  le Massif central, pour un séjour d'une semaine. Ski, randonnées sur neige, culture locale et visites sont au programme.

    • Vingt élèves de la classe de CM2 de l'école de la Tilleulière sont partis lundi matin en classe de neige. Le car a pris la direction de Super-Besse, dans le Massif central, pour un séjour d'une semaine. Ski, randonnées sur neige, culture locale et visites sont au programme.





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